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ALIFAX STREET
21 septembre 2014

UNE FOLIE NÉCESSAIRE

Il fallait s'orienter par rapport au château d'eau. Si on voulait rejoindre l'unique centre de secours potable, il ne fallait en aucun cas perdre de vue ce château d'eau encore debout. Je me demandais ce qu'était devenu le pouilleux, je me demandais s'il était toujours en vie, si les autres ordures l'avaient coincé après nous avoir délogé du tank, et s'il était libre, comment il allait réussir pour progresser en direction de ce foutu centre. Je me posais sûrement trop de questions, le pouilleux était malin, il savait brouiller les pistes, il savait ne pas se faire remarquer. Le fait qu'il ne parle pas, était en fin de compte, un avantage pour lui. Son corps ressemblait à sa langue, il était silencieux et ne gaspillait aucun mouvement en geste inutile. J'ai pris la main de Nalie, je l'ai forcé à garder la cadence. Elle n'en pouvait plus, elle se plaignait de ses pieds, de ses jambes, de tous ses muscles. A 11 ans, elle était déjà prête à s'écrouler pour se laisser dévorer par la terre. J’ai osé prononcer : « On va y arriver, t’as pas le droit de baisser les bras, on va aller au centre et on sera en sécurité. Faut avancer, Nalie. » Elle n’a pas pleurniché, elle a dégagé sa main de la mienne et elle s’est remise à marcher sans en débloquer une. Cette gosse n’avait plus rien, ni famille ni maison ni rêve ni ses 11 ans. Elle avait juste une sorte d’énergie du désespoir qui la portait à bout de nerfs. Si le château d’eau s’effondrait, on tombait en ruine avec lui. On était identique à ce type barge qui attaque des moulins, cette histoire que j’avais lu au collège. Notre quête était une pure folie, celle de sauver notre peau par n’importe quel moyen. Une folie nécessaire si on voulait un jour retrouver un semblant de sourire.

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