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ALIFAX STREET
28 septembre 2014

GARY

Les maisons continuaient de se construire autour des immeubles. Le week-end, les futures familles propriétaires se déplaçaient en voiture pour se rendre compte de l'évolution des chantiers. On les observait du haut du balcon. Quand il faisait beau, on passait presque toute la journée sur le balcon. Derrière la baie-vitrée, la télé allumée diffusait n'importe quel programme ou les sons répétitifs d'un jeu vidéo. La petite s'exclamait : "Ils ont donné un prénom au champignon ! Ils l'ont appelé "Gary" ! Gary le champignon ! L'délire !" Les familles restaient des plombes devant leurs baraques en construction, elles fixaient les parpaings, les tuyaux qui sortaient du ciment, la charpente des toitures. Toutes les maisons étaient collées les unes aux autres. Chaque espace était bouffé par ces logements. Plus loin, le bois qui abritait biches, oiseaux de nuit et autre faune, résistait encore à l'invasion, mais plus pour longtemps, c'était couru. Plus tard, lorsque le soir s'installait, on surfait quelques minutes sur des réseaux et comme on s'emmerdait à en mourir, on éteignait l'ordi et on se parlait en buvant du vin ou du soda trafiqué qui nous assommait pour la nuit. En semaine, la petite se levait à 7h15. Je n'écrivais plus, je faisais semblant de réfléchir. Les ouvriers arrivaient à 8h, les parpaings s'empilaient, des chiens dans d'autres apparts se mettaient à aboyer, une gueulante était poussée et les chiens se taisaient. Je tentais l'équivalent d'une phrase avant de tout supprimer puis de me remettre à faire semblant de réfléchir jusqu'au week-end prochain. Comme dans "Rat de Bohème", je me forçais à croire que cette combinaison-là rendait ma vie digne d'être vécue.

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